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La péréquation du revenu disponible peut faire penser à la proposition d’allocation universelle qui se définit comme « un revenu versé par une collectivité politique à tous ses membres, sur base individuelle, sans contrôle des ressources ni exigence de contrepartie. »1)L’allocation universelle, Yannick Vanderborght et Philippe Van Parijs, La Découverte, Collection Repères, 2005, page 6. Diverses appellations correspondent à cette définition : revenu universel, revenu d’existence, dividende territorial, revenu de base, dividende national, revenu inconditionnel… Nous retiendrons ici le terme d’allocation universelle.

La proposition de péréquation du revenu disponible comporte en elle-même une allocation qui est donnée à l’entreprise en fonction de la présence dans celle-ci d’un travailleur en équivalent temps plein. A l’inverse de l’allocation universelle où la question du financement reste ouverte, la péréquation intègre son propre système basé sur un prélèvement du Revenu disponible. Il lui est indissociable : on ne pratique pas des échanges monétaires massifs mais on opère à la marge, sur la différence entre ce que doit l’entreprise et ce qu’elle est censée recevoir.

Le prélèvement sur le Revenu disponible que nous venons de définir pourrait être un moyen de financement de cette allocation universelle. Dans un tel cas, les entreprises ne toucheraient pas une contrepartie qu’elles reverseraient à leurs travailleurs, mais les individus la recevraient en tant que telle. C’est ici que s’opère la différence essentielle entre les deux propositions. L’allocation universelle est versée à tout individu indépendamment de sa position à l’égard du travail, qu’il soit employé ou non. À l’inverse, l’allocation de la péréquation est versée à l’entreprise en fonction du nombre de travailleurs en équivalent temps plein. Elle constitue ainsi une fraction de la rémunération du travailleur.

Cependant, compte tenu du chômage massif existant dans nos sociétés, on peut se demander si l’introduction de l’allocation universelle ne va pas diviser la société en deux parties, une qui serait affectée à des postes officiellement productifs alors que l’autre serait contrainte de se contenter de l’allocation universelle. Le danger serait alors réel que la partie en poste, qui se verrait ponctionnée pour financer l’allocation universelle, conteste rapidement la fainéantise de l’autre partie et remette en cause le montant de l’allocation, celle-ci devenant non pas un revenu permettant de vivre dignement mais un revenu de substitution qui s’inscrirait alors dans une logique toute libérale. Inversement, l’autre partie pourrait contester que son activité libre ait moins de valeur que celle des personnes en poste et pourrait contester qu’elle soit moins bien payée. En d’autres termes, face au chômage, ne vaudrait-il pas mieux s’engager dans une politique de réduction généralisée du temps de travail avec créations de postes de façon à s’assurer que toute personne souhaitant travailler ait la garantie d’en trouver un ? Pratiquée sans perte de salaire, une telle politique aurait pour effet d’augmenter la part des salaires dans la valeur ajoutée et la péréquation prend ici tout son sens en transférant les profits des entreprises riches vers celle à faible valeur ajoutée qui pourront ainsi maintenir leurs emplois.

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References   [ + ]

1. L’allocation universelle, Yannick Vanderborght et Philippe Van Parijs, La Découverte, Collection Repères, 2005, page 6.
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