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Alors que le chômage n’a jamais disparu en 40 ans, la vague de licenciements qui s’annonce va être source de nouveaux drames humains. Il est urgent de mettre un terme à cette situation. Une seule solution : imposer que l’ensemble des entreprises emploie toutes les personnes qui le souhaitent à des niveaux de salaires convenables. Et pour ce faire, un seul moyen : l’argent !

« Plus rien ne sera jamais comme avant » dit-on régulièrement avec cette crise du Covid-19. Mais il y a une chose dont on est déjà certain, c’est que les licenciements ont commencé et vont se poursuivre. Nous allons avoir un niveau de chômage sans commune mesure avec ce que nous avions préalablement à cette crise. Alors si plus rien ne doit être comme avant, ne pourrions nous pas imaginer une société débarrassée du chômage, une société dans laquelle les individus auraient le choix entre plusieurs emplois et où les entreprises seraient à la recherche de travailleur.ses ? Et bien cette société est possible et il faut nous y engager au plus vite pour ne pas avoir à subir une relance à grand coup de remise en cause des acquis sociaux sans aucune prise en compte de l’écologie.

La péréquation des revenus disponibles

Comment faire pour inciter les entreprises à embaucher ? Facile, il suffit de payer ! Imaginons donc que chaque entreprise touche tous les mois 1500 euros pour chaque personne employée à temps plein. Soyez immédiatement rassurés : ce n’est pas un cadeau fait aux entreprises car il y aura une contrepartie. Mais dans l’immédiat, cela signifie une chose extrêmement simple : plus il y a de personnes dans l’entreprise, plus elle gagne. Donc les entreprises sont incitées à avoir du monde, à employer. Si une entreprise licencie une personne, elle aura d’office 1500 euros en moins tous les mois.

Mais d’où vient cet argent ? Il n’est pas magique, ce n’est pas l’État qui va abonder, ce n’est pas une dette publique qui grossira sans fin. Ce sont les entreprises qui vont elles-mêmes fournir cet argent : on va établir un nouveau régime de sécurité sociale obligatoire auquel toutes les entreprises seront affiliées.

Pour financer ce régime, nous allons prendre comme base de prélèvement la différence entre les encaissements de factures et les paiements des fournisseurs1)Nous prendrons aussi en flux entrant les subventions ainsi que les financements par emprunts obtenus et en flux sortant les impôts, taxes et les remboursements d’emprunts, principal comme intérêts.. C’est cette différence qui permet de payer les salaires. Nous appellerons ce flux de trésorerie, le « revenu disponible » de l’entreprise. Selon des calculs réalisés sur la base des comptes nationaux de 2018 de l’Insee, pour verser à chaque entreprise 1500 euros par personne employée, il est nécessaire de prélever 31 % de ce flux de trésorerie2)Afin de ne pas réaliser des transferts trop importants de trésorerie, chaque mois, l’entreprise additionne tout ce qu’elle a reçu, déduit ce qu’elle a payé et calcule ce qu’elle doit par application de ce pourcentage. En face de cela, elle connaît ce qu’elle va toucher : autant d’allocations qu’il y a de personnes en équivalent temps plein. Si elle doit de l’argent au régime de sécurité sociale, elle paye immédiatement. Sinon, elle recevra cette différence dans les deux-trois jours qui suivront..

Nous venons de constituer un pot commun d’une partie des revenus des entreprises qui va être repartagé en fonction du nombre de personnes en temps plein dans chaque entreprise. Il s’agit d’une péréquation des revenus disponibles. Une partie de ces revenus n’est plus distribuée selon les règles du marché mais de façon égalitaire pour chaque personne en emploi.

Pousser les entreprises à embaucher

Avant l’établissement de ce régime, l’entreprise qui licenciait pour optimiser son profit perdait le bénéfice de l’apport de ce salarié, mais économisait son salaire et les cotisations associées. Avec ce régime, elle perdra en plus 1500 euros tous les mois, ce qui réduira d’autant l’intérêt de licencier.

Prenons le problème en sens inverse. Imaginons une entreprise qui embauche une personne supplémentaire. Avant l’établissement de ce régime, l’entreprise n’était gagnante que lorsque que le flux de trésorerie supplémentaire que génère cette personne était supérieur à son salaire, cotisations sociales comprises. Avec ce régime, elle sera gagnante beaucoup plus tôt : dès que le flux de trésorerie supplémentaire sera supérieur à la différence entre le salaire avec ses cotisations et l’allocation de 1500 euros.

Imaginons une boîte qui démarre. Cela peut être un indépendant ou plusieurs personnes. Cette entreprise sait qu’elle va d’office recevoir 1500 euros par personne en poste. Comme une boite qui commence n’a généralement pas de rentrées d’argent immédiates, ceci constituera une aide au démarrage systématique qui n’existe pas à ce jour. Bien sûr, son activité ne tardera pas à générer de l’argent et elle sait pertinemment que 31 % de celui-ci sera prélevé tout en touchant toujours l’allocation de 1500 euros par personne. Ce système va donc lui être de moins en moins favorable jusqu’à ce qu’elle gagne tellement d’argent – ce qu’on lui souhaite – qu’elle devra plus que ce dont elle a droit. Le système l’a aidé à se créer et lorsque l’entreprise sera lancée, elle aidera alors les autres.

Un nouveau régime de sécurité sociale des revenus

Toutes les entreprises ont donc intérêt à embaucher. Est-ce qu’elles seront toutes favorables à ce système ? Bien sûr que non : certaines entreprises seront perdantes car elles paieront généralement plus qu’elles ne recevront. À noter la fonction d’amortisseur de difficultés économiques de la péréquation : une entreprise peut très bien être chroniquement contributrice du système mais en bénéficier en cas de faiblesse momentanée de son activité. Quoiqu’il en soit, nous ne recherchons pas l’adhésion des entreprises : il s’agit d’un nouveau régime obligatoire de sécurité sociale que nous imposerons comme nous avons su établir les cotisations sociales dans le passé.

Nous avons ici pris comme exemple une péréquation de 31 % des revenus disponibles. Nous aurions pu prendre un autre pourcentage : 20 %, 40%, 50 % voire plus encore. Si les pourcentages sont élevés, il sera sans doute possible de moduler l’allocation selon les qualifications ou une fraction décroissante des salaires. De même, il est possible de transformer tout ou partie de ces allocations en revenus inconditionnels directement versés aux individus, que ceux-ci soient en emploi ou pas. La péréquation des revenus disponibles est un système totalement ouvert dont les paramètres doivent faire l’objet d’une délibération démocratique.

Faire face à la vague de licenciements

Cette vague de licenciements a débuté. Pour l’instant, c’est la fin des contrats d’intérim et le non renouvellement des CDD. Demain, nous ferons face à des faillites de PME et à des vagues de licenciements dans les grands groupes.

Cette péréquation doit immédiatement être mise en place avec un pourcentage significatif de l’ordre de 30 %. Elle permettra de réduire les faillites et les vagues de licenciements. Nous savons d’ores et déjà que certaines activités seront durablement affectées, que d’autres devront décroître pour des raisons écologiques pendant que d’autres vont se développer. Il y aura donc des investissements à faire et des transitions professionnelles à réaliser. Cela pourra vouloir dire des évolutions d’entreprises vers de nouvelles activités, des licenciements et des créations d’entreprises.

La péréquation des revenus disponibles, en conjonction avec d’autres dispositifs – sécurité emploi formation, investissements publics – facilitera ces transitions en garantissant à toutes et à tous un emploi. En tout état de cause, la péréquation des revenus disponibles permettra de mettre un terme à la figure de l’auto-entrepreneur sans protection sociale et peinant difficilement à obtenir un revenu souvent inférieur au Smic. Alors qu’auparavant, les entreprises étaient en position de force et choisissaient les personnes qu’elles embauchaient, nous aurons désormais une société plus humaine dans laquelle chaque personne se verra proposer de multiples emplois et pourra effectuer un véritable choix.

Photo by Cason Asher on Unsplash

References   [ + ]

1. Nous prendrons aussi en flux entrant les subventions ainsi que les financements par emprunts obtenus et en flux sortant les impôts, taxes et les remboursements d’emprunts, principal comme intérêts.
2. Afin de ne pas réaliser des transferts trop importants de trésorerie, chaque mois, l’entreprise additionne tout ce qu’elle a reçu, déduit ce qu’elle a payé et calcule ce qu’elle doit par application de ce pourcentage. En face de cela, elle connaît ce qu’elle va toucher : autant d’allocations qu’il y a de personnes en équivalent temps plein. Si elle doit de l’argent au régime de sécurité sociale, elle paye immédiatement. Sinon, elle recevra cette différence dans les deux-trois jours qui suivront.
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